Formule Avantages
Comment parvient-on à cette formule ?
Les pouvoirs publics en France attribuent près de 100 milliards d’euros de marchés aux offres qui sont économiquement les plus avantageuses. Le code des marchés a été modifié en avril 2016 sur de nombreux points, mais il a toutefois conservé dans son article 62 le mode précédent d’attribution des marchés qui utilise des critères en les pondérant. La difficulté d’attribuer les marchés par le biais d’une analyse multicritères est donc toujours d’actualité.
Nous avons étudié ces dernières années les modes d’attribution d’environ 7 000 marchés importants et nous connaissons la plupart des modes de dévolution utilisés en France. Ceux-ci sont très variés : par exemple, nous avons identifié plus de 80 formules différentes utilisées dans la notation du prix des offres…
La littérature et la presse spécialisées abondent de commentaires sur les moyens de conduire une analyse multicritères. Et il semble que les modes d’analyse des offres actuellement utilisés, ou les commentaires faits dans ce domaine ne permettent pas d’apporter un jugement équitable et facilement compréhensible des offres présentées.
Nous proposons ci-dessous un mode d’analyse qui, nous l’espérons, permet de conduire l’attribution dans les meilleures conditions possibles pour parvenir à l’offre économiquement la plus avantageuse…
L’article 62 précise en substance que pour attribuer le marché aux entreprises qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, l’acheteur se fonde sur une pluralité de critères pondérés.
L’objectif recherché de l’offre économiquement la plus avantageuse doit se traduire dans un mode opérationnel, qui part de l’analyse de ces termes : une offre avantageuse est une offre dont le prix est intéressant, compte tenu de la qualité, de la quantité, de l'usage,… (Dictionnaire Larousse).
Dans le guide publié par la DAJ en 2013: «le prix dans les marchés publics », il est précisé en 5.2.1.2 : « La bonne gestion des deniers publics suppose que l’acheteur public analyse le rapport qualité/prix des prestations …». On doit donc analyser la qualité de l’offre et ensuite prendre en compte son prix. C’est aussi ce que demande la directive européenne 2014/24 CE : De nombreux articles, en particulier l’article 67, se réfèrent à la notion de l’offre économiquement la plus avantageuse comme étant l’offre qui présente le meilleur rapport qualité/prix, évalué à partir de critères pondérés.
Représentation graphique du rapport qualité/prix des offres
Le graphique suivant représente l’espace situant les offres qu’un acheteur est susceptible de recevoir. L’axe horizontal figure le prix des offres ; l’estimation du marché y a été placée. L’axe vertical détermine l’échelle de qualité des offres ; il est gradué sur 100 points : ceux-ci correspondent à la note d’une offre la moins disante et qui aurait aussi la note maximum à tous les critères.
Les offres de niveau inférieur au cahier des charges sont dans le secteur en rouge, situé sous la droite horizontale qui correspond au niveau de qualité « acceptable ». Le secteur vert est le lieu des offres respectant le cahier des charges ; il est limité au-dessus par le niveau de qualité correspondant à celle recherchée par l’acheteur. Chaque offre est figurée par son prix et par son niveau de qualité, mesuré par les notes obtenues aux différents critères.
Le rapport qualité/prix de chaque offre est la pente de la demi-droite (en pointillé bleu) joignant le point O et le point représentant l’offre. La pente la plus forte désigne l’offre de meilleur rapport qualité/prix, donc économiquement la plus avantageuse.
Sur ce graphique, l’offre A, d’un prix faible, n’atteint pas le niveau de qualité exigé dans le cahier des charges : elle doit donc être éliminée. L’offre B a un niveau de qualité juste acceptable et un prix beaucoup plus faible que l’offre C, qui atteint le niveau de qualité recherchée. Pourtant B et C sont situés sur la même demi-droite de rapport qualité/ prix, elles présentent le même avantage et recevront donc la même note. Une offre D est un peu plus chère que B, mais elle a un bon niveau de qualité : son rapport qualité/prix est le plus élevé des 4 offres, elle remporte donc la consultation.
Quand l’acheteur choisit d’élever la qualité acceptable dans le cahier des charges jusqu’au niveau de la qualité recherchée, la consultation devient une adjudication, sans aucun critère «qualité » : le critère « prix », correspondant au cahier des charges, est pondéré à 100% ; dans ce graphique ci-dessous, l’offre la moins chère gagne, ici l’offre E.
Cette représentation graphique des offres permet de mieux comprendre la méthode d’attribution des marchés qui vous est proposée.
Nous proposons de diviser la valeur économique de la qualité d’une offre déterminée par les critères pondérés choisis par l’acheteur, par son prix. Cette opération revient à calculer le rapport qualité/prix des prestations. Le résultat est proportionnel à la qualité des offres et inversement proportionnel à leur prix, ce qui nous paraît bien prendre en compte la définition de la mesure de l’avantage présenté par chaque offre.
Il est aussi possible de réaliser l’opération inverse, comme le propose la DAJ, Ministère des Finances ; mais le résultat est un prix et non une note. C’est la méthode des prix pondérés.
Une autre méthode consiste à diminuer le prix de l’offre de la valeur économique des critères selon leur réponse aux besoins exprimés ; mais ceci conduit aussi à un prix et non à une note. C’est la méthode des prix réduits.
Quelles unités choisir pour diviser la qualité des offres par leur prix ?
L’unité de prix ne pose pas de problème : ce sera l’unité monétaire, comme l’euro ou le dollar. Mais la mesure de la qualité est beaucoup plus délicate : il faut revenir au moment de la préparation du marché par l’acheteur public ; celui-ci estime le montant du marché et définit les critères de jugement qui seront utilisés, en les pondérant selon leur importance économique dans leur réponse aux besoins. La valeur économique de chaque critère est le pourcentage de l’estimation qui lui a été attribué.
Par exemple, si un marché a été estimé à 100 000 € et qu’un des critères C1 a été pondéré à 20%, sa valeur économique a été estimée à 20 000 € ; ce qui veut dire qu’une offre A qui aura la note maximum sur ce critère, parce qu’elle apporte une réponse parfaite aux besoins exprimés, aura une valeur économique de 20 000 € supérieure à une autre offre B qui ne répond pas du tout aux attentes de l’acheteur public sur ce même critère.
L’ensemble des critères présentant un total de 100% de pondération, on comprend que l’évaluation de la satisfaction apportée par une offre sur chacun des critères définis et leur somme, donne une valeur économique de la qualité de cette offre, en €.
Mais il nous faut à présent parler du cas particulier du critère « prix », qui est utilisé dans quasiment toutes les consultations.
Le critère prix, ce faux ami...
Ce critère « prix » a un nom trompeur, car il n’a rien à voir avec le prix des offres : il correspond en effet au coût de réalisation du seul cahier des charges qui a été défini dans la préparation du marché. Si dans l’exemple précédent d’un marché estimé à 100 000 €, deux critères seulement ont été utilisés : le critère C1 à 20% et le critère « prix » à 80%, ceci signifie que la réalisation du seul cahier des charges de la consultation, qui doit être obligatoirement respecté, a été estimée à 80 000 € par l’acheteur public.
Pourtant, il faut remarquer que le cahier des charges devant être parfaitement réalisé dans les offres proposées- ce qui se traduit par la signature de l’acte d’engagement- ces offres seront donc toutes notées à la note maximum pour le critère « prix ».
On remarque que la valeur économique d’un marché (son estimation) en €, multipliée par la somme des notes (pondérées) aux critères attribuées à l’offre, divisée par le montant de cette offre en €, donne un résultat sans dimension (puisqu’on divise un prix par un prix, multiplié par une note sans dimension), toujours supérieur à zéro.
Ce résultat est le rapport qualité/prix, qui est représenté par la pente de la demi-droite issue de O et passant par l’offre à noter, dans un repère où le prix est en abscisse et la note qualité est en ordonnée, sur 100 points. Aussi, la valeur zéro ne peut jamais être atteinte, puisque la pondération du prix n’est jamais nulle.
Cette mesure de l’offre économiquement la plus avantageuse d’une offre est donc opérationnelle : il suffit de multiplier d’abord le montant de l’estimation du marché déterminée par l’acheteur public par le résultat de notes obtenues sur chacun des critères pondérés, en prenant toujours la note maximum pour le critère prix ; on divise ensuite ce produit par le prix de l’offre pour obtenir la valeur économique de l’offre, qui mesure son avantage, donc son rapport qualité/prix :
Une offre P3 qui serait de 85 000 € et qui obtiendrait la note de 4/10 au critère C1 obtiendrait un avantage économique (avec l’estimation de 100 000 €) de : 100 000 x (0,80 x 10/10 + 0,20 x 4/10)/85 000 = 88 000/85 000 = 1.035
L’avantage de cette formule avec l’utilisation de l’évaluation du marché est que la note est indépendante du moins disant, ce qui est utile si ce dernier est rejeté. Mais on constate dans cet exemple que si une offre est inférieure à l’estimation, ce qui est très souvent le cas, l’avantage apporté obtenu sera souvent supérieur à 1.
Construction de l’échelle classique de notation du rapport qualité/prix
Il n’est en général pas souhaitable d’utiliser le montant de l’estimation du marché dans une échelle de notation, même si il n’est qu’une constante sans effet sur le classement des offres. Il nous semble préférable d’utiliser le montant de l’offre la moins chère à la place de l’estimation ; ceci procure un avantage supplémentaire : aucune note ne pourra être supérieur à 1 ; et si l’on multiplie toutes les notes obtenues par 100, l’échelle de notation sera alors de zéro à 100, ce qui est très pratique : notons au passage que le fait de remplacer l’estimation par l’offre la moins chère et de multiplier le résultat par 100 ne change pas la hiérarchie des offres ni le caractère sans dimension de l’ avantage apporté .
La formule de notation des offres peut alors s’écrire ainsi :
On remarque que la multiplication par 100 de chacune des pondérations des critères revient à utiliser le nombre de points de pourcentage donné à chacun des critères.
Par exemple, la pondération du critère C1 à 20% vaut numériquement 0.2. Comme on multiplie par 100 cette pondération, celle-ci vaut donc 20, ce qui correspond aux points de pourcentage attribués à C1. La simplification de la formule précédente s’écrit alors :
Présentation de la formule "Avantages"
Dans l’exemple précédent le résultat était le suivant : Note P1= 85 000/100 000 x (80 x 10/10 + 20 x 4/10) = 0.85 x 88 = 74.80 sur 100.
Voici maintenant un exemple avec trois critères :
|
Offre A |
Offre B |
Offre C |
Montant |
85 000€ |
93 000€ |
98 000€ |
Note Prix |
10/10 |
10/10 |
10/10 |
Points C1 (Prix) à 60% |
60 |
60 |
60 |
Note C2 |
3/10 |
5/10 |
7/10 |
Points C2 à 30% |
9 |
15 |
21 |
Note C3 |
5/10 |
4/10 |
8/10 |
Points C3 à 10% |
5 |
4 |
8 |
Total Qualité |
74/100 |
79/100 |
89/100 |
Résultat Avantages |
74/100 |
72,2/100 |
77,2/100 |
Exemple de calcul de la note de l’offre C : Note C = 85 000/98 000 x (60 +21 +8) = 77.2 points sur 100.
Le gagnant est l’offre C avec 77.2 sur 100. C’était la plus chère, mais elle a compensé son prix élevé par de bonnes réponses aux critères demandés.
Comparaison avec les modes de dévolution actuels
Le mode de dévolution majoritairement utilisé en France est de calculer la note du prix P = Points du prix x Po/P (Po étant l’offre la moins chère), à laquelle on ajoute la note « qualité » calculée comme ci-dessus : (points du crit. C1 x note de P sur C1+ …)
On remarque que la méthode est pratiquement la même, puisqu’on peut décomposer la formule Avantages en : %prix x Po/P et en : points du crit. C1 x note de P sur C1+ …), qui donne la note qualité. Mais alors, où est la différence ?
La différence vient du fait que la note qualité est –elle aussi- multipliée dans la formule par Po/P, comme le prix P.
La note qualité est donc réduite dans les mêmes proportions que le prix : si le prix d’une offre est le double de l’offre moins disante, sa note de prix sera la moitié de celle de l’offre moins disante, mais la note qualité sera aussi divisée par 2 !
Aucune formule de notation en Europe – à notre connaissance – ne réduit la note qualité d’une offre selon le rapport de son prix avec le moins disant.
Pourquoi multiplier la note « qualité » par le rapport Po/P ?
Parce qu’on n’a pas le droit de comparer deux notes qui n’ont pas la même unité : peut-on comparer une note sur 10 avec une note sur 100 ? Non, bien sûr, il faudra au préalable les transformer selon une même unité : ici, il faudra réduire au même dénominateur les deux notes, qui est ici 1000 ;la première note (sur 10) sera multipliée par 100 et la deuxième note par 10. Elles seront alors comparables.
Par exemple, comparer 5/10 et 42/100 oblige à multiplier les numérateurs et les dénominateurs du premier par 100, ce qui est égal à 500/1000 ; de même, la valeur 42/100 doit être multipliée haut et bas par 10, ce qui donne 420/1000 : on peut alors comparer 500/1000 et 420/1000.
Or, la valeur du point de chaque offre est définie comme le centième de son montant ; de même pour l’estimation, qui définit ainsi la valeur du point de pondération. Par exemple, une estimation de 10 000 € donnera une valeur du point de 100 € ; si le critère délai est pondéré à 10%, l’estimation de sa valeur économique pour le délai le plus court proposé, mais acceptable est de 10 points à 100 €, soit 1 000 €.
De même, si une offre de 7000 € n’obtient que 5 points à ce critère délai, la valeur de ce critère sera de 350 €, puisque chaque point a une valeur de 7000/100= 70 €. Une autre offre de 9 000 €, qui déterminera sa valeur du point de 90 €, verra la valeur des 10 points du critère délai qu’elle a obtenue par sa proposition à 900 €. On voit que les 5 points de la première offre -350 €- ne peuvent pas être comparés directement à la valeur des points de l’offre précédente, puisque ses 10 points valaient 900 €, ce qui équivaut à 5 points pour 450 € ; et non pas 5 points pour 350 €, trouvés pour la première offre. Il sera nécessaire de multiplier la valeur de 450 € par le rapport 7000/9000 pour trouver les 350 € de valeur correcte. On a donc dû multiplier la note de délai de la deuxième offre par Po/P pour lui attribuer une valeur qui peut être comparée à l’offre la moins chère.
De manière générale, les points « qualité » obtenus par une offre doivent être multipliés par le rapport Po/P, pour qu’ils puissent être comparés entre eux, ce qui conduit à la formule Avantages.
Rappelons au passage que l’introduction de l’offre moins-disante, aussi bien dans Avantages, que dans le mode de notation actuel pose le problème de modification de la notation si cette offre moins-disante est éliminée, pour une raison quelconque. Mais cette offre permet de construire un barème clair, entre zéro et 100.
Origines de la formule Avantages
On remarque que le « guide des prix » édité par la DAJ du Ministère des Finances, en page 54 sous le numéro 5.2.3.4, s’intitule « : « doit-on comparer la note du prix obtenue indépendamment des autres critères ou en lien entre eux ? ». Le paragraphe ajoute : « un prix déconnecté du niveau de qualité pour lequel il est proposé n’a pas de sens… ». Dans l’exemple cité pour illustrer ces principes, le mode de prise en compte de la valeur de la qualité est le même que dans la formule Avantages, à savoir la somme des pondérations de chaque critère multipliées par les notes obtenues par l’offre, avec la note du critère « prix » toujours prise au maximum. Mais la formule indiquée calcule le prix pondéré, et non pas l’avantage apporté. Le résultat de cette formule n’est pas la note d’une offre. La formule des prix pondérés peut être d’ailleurs utilisée idéalement dans les appels d’offres sur enchères électroniques, dans lesquelles le prix de l’offre est modifié en permanence par la production de nouveaux prix et/ou la modification de la réponse qualité de l’offre. Il suffit en effet de changer les notes qualité nouvellement obtenues (seulement quantitatives) et/ou le prix nouveau de l’offre pour déterminer la nouvelle valeur de celle-ci.
Cette formule des prix pondérés ne donne donc pas de notes aux offres et n’utilise pas le prix de l’offre la moins chère.
Le cas des offres anormalement basses
Il est à noter que la formule Avantages (ou la formule des prix pondérés de la DAJ) permettent d’identifier les offres anormalement basses (OAB) sans difficulté, puisque la valeur des critères « qualité » est intégrée dans la note (ou dans le prix pondéré) : il suffit de fixer une différence de note -de 20 points par exemple- ou un écart de prix en pourcentage -de 30 points par exemple pour les prix pondérés- pour détecter légitimement les offres suspectes.
Prenons un exemple d’application de la formule Avantages, avec recherche d’OAB :
|
Offre A |
Offre B |
Offre C |
Offre D |
Montant (estimation à 125 000€) |
100 000€ |
120 000€ |
150 000€ |
160 000€ |
Note Prix |
10/10 |
10/10 |
10/10 |
10/10 |
Points C1 (Prix) à 40% |
40 |
40 |
40 |
40 |
Note C2 |
7/10 |
5/10 |
4/10 |
9/10 |
Points C2 à 20% |
14 |
10 |
8 |
18 |
Note C3 |
9/10 |
4/10 |
5/10 |
9/10 |
Points C3 à 10% |
9 |
4 |
5 |
9 |
Note C4 |
6/10 |
3/10 |
4/10 |
10/10 |
Points C4 à 30% |
18 |
9 |
12 |
30 |
Total Qualité |
81/100 |
63/100 |
65/100 |
97/100 |
Valeur de PO/P |
1 |
0,83 |
0,66 |
0,625 |
Résultat Avantages |
81/100 |
52.5/100 |
43.3/100 |
60.6/100 |
Classement Avantages |
1 |
3 |
4 |
2 |
Notes méthode actuelle |
81/100 |
56.3/100 |
51.6/100 |
82/100 |
On remarque que le gagnant est A avec la méthode Avantages qui lui donne 81 points, alors que la méthode actuelle de notation donne D gagnant avec 82 points, alors que A n’obtient que 81 points. Il y a pourtant plus de 20 points d’écart avec D avec la méthode Avantages…
Recherche d’OAB
Si l’acheteur public avait fixé à 20 points d’écart la suspicion d’OAB, on remarque que le plus petit écart entre l’offre A est de plus de 20 points avec l’offre D. Cet écart vient d’une offre A peu chère, avec de bonnes notes aux critères. L’offre A fera donc l’objet d’une suspicion d’OAB.
On note que la méthode des prix pondérés aurait donné un prix pondéré pour A de 100 000/0.81 = 123 400 € et pour D de 164 950 €. L’écart des prix pondérés est de plus de 33%. Si l’écart des prix pondérés avait été fixé à 30% pour la recherche d’OAB, (ce qui est plus élevé que 20 points dans la méthode Avantages, car les prix pondérés augmentent alors que le rapport Q/P diminue), on doit suspecter également l’offre A d’OAB.
Notation des offres variables
L’ordonnance de juillet 2015 permet la présentation d’offres variables, dans lesquelles un opérateur économique propose un rabais si il obtient plusieurs offres ensemble.
Mais la notation de ces offres est très difficile : la formule Avantages ainsi que la dévolution par le prix réduits permettent cette dévolution. Rappelons que cette dernière méthode consiste en l’affectation d’une valeur financière à chacun des critères (le critère prix n’existant pas) et de diminuer le montant de l’offre par la valeur de chacun des critères, obtenue en multipliant la note de l’offre par sa valeur financière.
Le prix avec le rabais proposé par l’entreprise se substitue dans la formule Avantages aux prix modifiés, les autres prix étant inchangés ; il suffit alors d’additionner les notes nouvelles obtenues par l’entreprise grâce à son rabais, avec l’addition des notes des offres les mieux notées sur les lots concernés. Reprenons l’exemple de la page 5, en le considérant comme données d’un lot 1 :
|
Offre A |
Offre B |
Offre C |
Montant |
85 000€ |
93 000€ |
98 000€ |
Note Prix |
10/10 |
10/10 |
10/10 |
Points C1 (Prix) à 60% |
60 |
60 |
60 |
Note C2 |
3/10 |
5/10 |
7/10 |
Points C2 à 30% |
9 |
15 |
21 |
Note C3 |
5/10 |
4/10 |
8/10 |
Points C3 à 10% |
5 |
4 |
8 |
Total Qualité |
74/100 |
79/100 |
89/100 |
Résultat Avantages |
74/100 |
72,2/100 |
77,2/100
|
Ce lot est remporté par C ; le moins disant a fait une offre de 85 000 €. Dans le lot 2 ci-dessous, l’offre la moins disante est de 170 000€ :
|
Offre A |
Offre B |
Offre C |
Montant |
180 000€ |
170 000€ |
205 000€ |
Note Prix |
10/10 |
10/10 |
10/10 |
Points C1 (Prix) à 40% |
40 |
40 |
40 |
Note C2 |
5/10 |
5/10 |
7/10 |
Points C2 à 30% |
10 |
10 |
14 |
Note C3 |
6/10 |
6/10 |
6/10 |
Points C3 à 10% |
24 |
24 |
24 |
Total |
74/100 |
74/100 |
78/100 |
Rapport Q/P |
69,9/100 |
74/100 |
68,5/100 |
Cette fois, c’est l’offre la moins disante qui remporte le lot. L’entreprise A a proposé 10% de rabais si elle obtient les deux lots. Son offre pour le lot 1 devient 76 500 € et reste moins disante. Sa note reste donc de 74 points ; mais l’offre B n’obtient plus que 71.8 points et C : 69.5 points
Son offre pour le lot 2 devient 162 000 € et devient moins disante. Sa note devient 74 points ; mais l’offre B n’obtient plus que 70.5 points et C : 61.6 points. L’offre variable A obtient donc 74 + 74 = 148 points ; la somme des notes transformées des meilleures offres concurrentes vaut 71.8 + 70.5 = 142.3 points.
L’opérateur A remporte donc les 2 lots, grâce à son rabais considérable de 10% et par sa note correcte sur le lot 1.
Représentation graphique de la formule Avantages
La représentation graphique du mode de dévolution par adjudication (fig.1) permet de déterminer la courbe de décroissance des notes des offres en fonction de leur prix.
Il est ensuite possible d’en déduire les courbes de décroissance des notes dans le cas plus difficile de consultation avec plusieurs critères (fig.2) : en effet, la courbe fonction du prix correspondant à la somme de tous les critères notés au maximum doit correspondre à la courbe trouvée pour l’adjudication.
L’avantage apporté par une offre est la pente de la demi-droite issue de O et passant par l’offre d’abscisse « prix » et d’ordonnée « qualité ». L’ordonnée « qualité » est graduée entre zéro et 100. La valeur 100 correspond à l’offre la moins chère et qui a toutes les notes maximum aux critères choisis. L’abscisse « prix » est exprimée en €.
Rappelons que l’attribution d’un marché se fait à l’offre la moins chère qui respecte parfaitement le cahier des charges, aucun critère « qualité » autre que le prix n’intervenant (ce qui correspond à un critère « prix » à 100%, puisque ce critère représente le cahier des charges).
Représentation de plusieurs offres par la méthode de l’adjudication (Fig.1)
Dans cette consultation à 3 offres : l’offre A est la moins disante ; sa note est de 100 points.la demi-droite OA1 représente son avantage apporté (son rapport qualité/prix). L’offre B est plus chère ; sa note est aussi de 100 points ; la droite OB1 représente son avantage apporté.
OB1 coupe A1-A en A2 : les points A2 et B1 ont le même avantage apporté, puisqu’ils sont tous deux sur la droite OB1. On en déduit que la note qualité de l’offre B est égale à l’ordonnée du point A2, appelé B2. On en déduit la valeur de B2 qui est : 100%x PA/PB (théorème des triangles semblables O-B-B1 et A2-B2-B1)
De même pour l’offre C : sa note qualité est aussi de 100 points ; son avantage apporté est la valeur de l’ordonnée A3, égale à celle du point C2.
Dans un exemple, si B vaut 50% de plus qu’A : la note de B sera de 66.6 points sur 100. si C vaut 75% de plus que PA : la note de B sera de 57.1 points.
(Dans un dernier exemple, si C valait le double de A, sa note sera de 50 sur 100.)
Si l’on joint toutes les valeurs possibles des ordonnées A1, B2, C2, qui sont toutes les notes de offres en fonction de leur prix P, on détermine une hyperbole qui admet l’axe des prix P comme asymptote : si une offre est très élevée par rapport à A, sa valeur s’approche de zéro (tout en restant positive).
Illustration de plusieurs offres avec plusieurs critères (Fig.2)
Les 100 points sur l’ordonnée « qualité » doivent être répartis entre les poids des critères choisis : sur ce graphique, le critère « prix » (représentant le cahier des charges) a été par exemple pondéré à 40% (courbe verte) ; un critère « valeur technique » (courbe orange) est pondéré à 30 % ; un critère « environnement » (courbe bleue) est pondéré à 20 % et un dernier critère « délai » (courbe noire, somme des différents critères), est pondéré à 10%.
Si l’offre D est la moins chère et qu’elle obtient la note maximum aux critères VT, environnement et délai, elle sera notée 40 + 30 +20 + 10= 100 points, identique à l’offre A de la courbe 1 ; si elle est la moins chère et qu’elle obtient zéro aux 3 critères VT, environnement et délai, elle sera notée 40 points (en D4). Si elle a par exemple la moitié des points aux critères VT, environnement et délai, elle sera notée : 40 +15+10 + 5= 70 points
Une offre E est plus chère que l’offre D ; si elle obtient la note maximum aux critères VT, environnement et délai, elle sera notée 100 x OD/OE points (en E1); si elle obtient zéro aux 3 critères VT, environnement et délai, elle sera notée 40 points x OD/OE (en E4). Si elle a par exemple la moitié des points aux 3 critères, elle sera notée 40 +15+10 +5= 70 points x OD/OE. La notation se déduit également à partir des triangles semblables qui ont comme bases OD et OE.
Une offre F est encore plus chère que D et E ; Si elle a la note maximum aux trois critères qualité, elle aura 100 points x offre D/offre F (en F1) ; si elle a zéro aux 3 critères qualité, elle sera notée 40 points x offre D/offre F (en F4).
Si l’on joint toutes les valeurs possibles des ordonnées D1, E1, F1… ; D2, E2, F2 ;…, on détermine des hyperboles qui sont les limites de notation pour les offres ayant les notes maximum aux différents critères.
Si l’on prend l’exemple de 4 offres situées toutes sur la même droite de valeur économique égale à 1 (qui est la pente de la droite T), il convient donc de trouver 4 notes égales pour ces 4 offres : en effet, on vérifie que la note de H1 est égale à 28 points /28 k€= 1 ; de même, H2 obtient 37 points pour un prix de 37 k€, soit une note de 1 ; idem pour H3 et H4 qui obtiennent 1 comme note. H1 n’a obtenu aucun point pour les 3 critères qualité ; H2 a obtenu le maximum pour le critère VT et zéro aux deux autres ; etc., H4 obtenant la note maximum aux trois critères qualité.
Représentation de la notation actuelle
Dans le mode de dévolution qui est utilisé très majoritairement par les pouvoirs adjudicateurs, la note du prix est calculée de la même façon qu’Avantages: elle est aussi représentée par l’hyperbole D4, E4, F4….
Mais la différence tient dans le fait que la note « qualité » est ajoutée à la note « prix » sans réduction : sa représentation graphique pour les offres qui auraient les notes maximum sur tous les critères « qualité » est l’hyperbole de couleur rouge obtenue en ajoutant cette note maximum à la courbe « prix ». On remarque qu’avec la méthode de notation actuelle, H4’ aurait obtenu 78 points au lieu de 44, pour un même prix de 44 €, si la note des 3 critères «qualité » est maximum ! Par contre, si ces critères sont tous notés zéro, soit le point H1, les notes sont égales à 28 points pour les 2 méthodes de notation.
On constate que cette hyperbole rouge .se détache très vite de l’hyperbole Avantages située juste en dessous pour les offres ayant aussi les notes maximum aux critères « qualité ».
On remarque que plus les notes des offres sont mauvaises en qualité, plus les 2 modes de notation se rapprochent, jusqu’à l’hyperbole D4, E4, F4…, pour laquelle les notes qualité sont toutes zéro.
Le mode de notation actuel favorise donc beaucoup les offres ayant de bonnes notes « qualité », en distordant le résultat de l’avantage apporté par cette qualité, pour les raisons décrites ci-dessus.
Exemple de distorsion
Nous allons comparer la méthode traditionnelle de notation avec la méthode Avantages, dans un exemple particulier, volontairement exagéré.
Un acheteur public veut acheter une bicyclette de service, évaluée à 1 000 €. Il a pondéré le critère « prix » à 40% et le critère « qualité de la bicyclette » à 60%, pour avoir des propositions variées sur son équipement et reçoit deux offres :
|
Offre A |
Offre B |
Montant |
700€ |
700 000€ |
Note Prix à 40% |
40/40 |
0,04/40 |
Note Qualité |
3/10 |
10/10 |
Note Qualité à 60% |
18/60 |
60/60 |
Note globale |
58/100 |
60,04/100 |
L’offre B gagne facilement avec la méthode traditionnelle de notation, tout en proposant un vélo au prix de 3 Ferrari !
On constate donc que l’absence de réduction de la note qualité en fonction du rapport des prix des offres conduit à des absurdités…
Notation Avantages pour la même consultation :
La formule Avantages donne la même note à A (58 points), mais la note de B devient : 700/700 000 x (40 +60)=0.1 point, ce qui est sa vraie valeur !
Conclusion
La méthode de notation Avantages des offres présentées dans la réponse à une consultation conduit à une équité parfaite dans le mode de calcul des notes des offres. On devrait constater avec son utilisation des gains importants d’efficacité et de justice de la commande publique. Avantages est très simple à appliquer en notant sur 100 les offres, avec des résultats toujours supérieurs à zéro et permet la suspicion aisée d’offres anormalement basses. Elle permet également la notation des offres variables.
Son application est très vaste, puisqu’elle concerne toutes les consultations utilisant des critères de choix pondérés. Elle ne dépend ni du nombre de critères, ni de leur pondération (si son total vaut 100%), ni du niveau des offres.